Vous avez rejoint Safran Identity & Security, ou plutôt Morpho à l’époque, l’année dernière. Que retenez-vous des 18 derniers mois ?
A.B. : Cette année a été charnière. Nous avons redéfini l’orientation de l’entreprise selon deux axes : l’accélération de la digitalisation, et notre positionnement sur des marchés dynamiques. Nous avons retravaillé le sens de notre mission, qui est de faire des identités de confiance un pilier du monde numérique à travers des solutions d’identification et d’authentification fiables.
La transformation numérique a totalement changé notre regard sur les questions d’identité, à un rythme que nous n’aurions jamais imaginé il y a seulement quelques années ! C’est pour nous une formidable opportunité.
Quelles nouvelles perspectives envisagez-vous ?
A.B. : Les marchés de la sécurité et de l’identité se portent bien et sont en croissance. De nouveaux secteurs comme la santé, l’économie collaborative, les activités bancaires et commerciales se tournent de plus en plus vers l’authentification biométrique. Les fournisseurs de services sont entrainés par l’adoption massive de la biométrie sur smartphones et tablettes et doivent maintenant monter d’un cran en termes de sécurité. Les capteurs biométriques actuels sont peut-être suffisants pour déverrouiller un smartphone, mais sont-ils assez sûrs pour protéger mes informations personnelles ou une transaction importante ? Pas encore. C’est là que nous avons un rôle à jouer. Travailler avec les clients les plus exigeants sur ce marché, comme le FBI, nous a permis de mettre au point les algorithmes biométriques les plus avancés au monde, qui sont actuellement en cours de déploiement chez des géants du monde commercial comme Samsung et Visa. Ce n’était pas le cas il y a un an.
Dans le domaine de la sécurité publique, où la lutte contre la menace terroriste est une priorité absolue pour les Gouvernements, l’analyse vidéo et l’analyse de données sont devenues des outils essentiels. Nous avons déjà une grande expertise dans ces technologies et nous comptons continuer à les développer. Les États recherchent aujourd’hui des moyens intelligents et moins intrusifs pour identifier les menaces, sécuriser les zones critiques comme les aéroports ou les stades, et protéger les espaces ouverts comme les gares ou les routes. Ils attendent des industriels une parfaite maîtrise à la fois des contraintes techniques et de la réglementation, souvent complexe, notamment lorsqu’il s’agit d’activités transfrontalières. Savoir gérer de grandes quantités de données interopérables entre différents systèmes et différents pays est une de nos grandes expertises, acquise au fil de nos projets avec les gouvernements du monde entier.
Nous sommes également bien positionnés pour développer l’identité numérique sur les marchés publics et privés. Le besoin de convergence entre les deux est fort. Néanmoins, cela implique de réfléchir à une vision partagée en matière de protection des données et de respect de la vie privée. Et l’identité numérique ne s’applique pas qu’aux personnes, elle concerne aussi les objets ! Rendez-vous compte que le nombre d’objets connectés, déjà estimé à plus de 20 milliards aujourd’hui, sera multiplié par 3 d’ici à 5 ans ! Voitures, avions, équipements médicaux : ils sont maintenant intégrés partout et assurer leur identité et celles des utilisateurs qui y accèdent à distance est devenu un enjeu majeur.
Safran a annoncé avoir engagé des négociations exclusives pour la vente de Safran Identity & Security à Advent International. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce projet ?
A.B. : Advent, qui est aussi l’actionnaire principal d’Oberthur Technologies (OT), projette de rapprocher les deux entreprises pour créer un leader mondial des technologies de l’identification et de la sécurité numérique. Bien entendu, nous devons parler au conditionnel puisque nous attendons un certain nombre d’autorisations pour finaliser la transaction. Le but est clairement une alliance entre égaux. Nous avons des atouts complémentaires qui nous permettraient de renforcer nos positions sur nos différents marchés. Nos portefeuilles sont équilibrés. Citons par exemple l’expérience d’OT dans la sécurité numérique embarquée et notre propre expertise dans la biométrie, l’identité et la sécurité publique. La future entité née de ce rapprochement interviendrait sur quatre marchés clés : la banque, le paiement, l’identité et la sécurité.
Quels sont les avantages potentiels d’un tel rapprochement ?
A.B. : Nos stratégies de développement sont alignées et Advent s’est engagé à maintenir des investissements conséquents sur nos marchés clés, qui évoluent rapidement. Safran Identity & Security compte à elle seule 20% de ses effectifs en R et D, et a déposé 64 brevets l’année dernière. La technologie et l’innovation font partie intégrante de notre ADN, et le resteront. L’engagement d’Advent nous permettrait de conserver notre avance technologique et de nous développer dans des domaines en plein essor comme la biométrie, l’authentification, la sécurité embarquée pour l’IoT, l’analyse de vidéos et de données, etc.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Nous espérons conclure la transaction mi-2017, après l’obtention des autorisations des administrations françaises et américaines et des autorités de la concurrence sur un certain nombre de marchés. Durant cette période, nous restons concentrés sur le business et le développement de nos technologies. Je suis d’ailleurs extrêmement fière de la motivation et de l’engagement dont nos équipes font preuve. En innovant dans des domaines en croissance, nous préservons la place de leader que nous détenons depuis longtemps sur les marchés de l’identité et de la sécurité.